Le pique-nique, de l’interdit au commun !
Le pique-nique, de l’interdit au commun !
Nadine Sayegh-Paris
Partager un repas dans la nature et déguster des sandwichs en plein air représentent aujourd’hui un acte bien ordinaire. Mais qu’en-était-il il y a quatre cents ans ? Et comment cet acte si ordinaire a-t-il évolué au fil des siècles ?
Bien que le pique-nique évoque l’été, les vacances en famille et surtout le casse-croûte au milieu d’une longue promenade, manger dans la nature, dans de beaux parcs, avec des produits provenant de la terre, n’a pas toujours été un acte commun et évident !
En effet, dans le temps, l’alimentation stigmatisait, elle différait si l’on était noble ou paysan, puisqu’une hiérarchie socio-culinaire classait les gens et les aliments en fonction de leur proximité avec le ciel. Ainsi, les légumes qui poussaient dans la terre étaient destinés aux pauvres alors que les élites se nourrissaient d’aliments proches du ciel, tels les oiseaux et les fruits.
‘Pick nick’ ou ‘piquer la nique’
Déjà le terme ‘pique-nique’ a bien évolué au fil du temps. L’expression a fait son apparition au XVIIe siècle dans le langage populaire, notamment dans la locution ‘’faire un repas à pique-nique’’ c’est-à-dire ‘’faire un repas où chacun paie sa part’’, avec davantage l’idée d’un moment à partager où chacun des convives apporte des mets, mais pas forcément à l’air libre! Pour devenir un siècle plus tard ‘’faire un pique-nique’’, soit ‘’manger hors de chez soi’’.
La locution ‘pique-nique’ est née de la réunion de la forme verbale ‘pique’ de ‘piquer, picorer, grignoter’ et de ‘nique’ ce mot, datant du XIIIe siècle, désignant ‘une chose sans valeur’. Ce qui donne ‘’picorer des petites choses par-ci par-là”. Cinquante ans après, l’expression arrive chez les voisins anglais qui adoptent l’orthographe ‘pick nick’, du verbe to pick ‘saisir’ et a nick, ‘point, instant’ comme dans l’expression ‘’in the nick of time’’. De l’interdit au commun !
Manger en extérieur sans table était pendant longtemps le cas des paysans qui mangeaient dans leurs champs accompagnés de leurs troupeaux. Plus tard, l’aristocratie le popularise en organisant des repas champêtres, luxueux, après les parties de chasse. D’ailleurs, Louis XIV, adorant cette pratique, se déplaçait toujours avec des carrosses remplies de viande, de pâtisseries et de fruits.
Ce n’est qu’au cours du XIXe siècle que le pique-nique vit son âge d’or et prend la forme que l’on lui connait aujourd’hui. Après la Révolution, lors des fêtes républicaines, le commun du peuple commençait à profiter pleinement des parcs et des jardins royaux, et organisait de bons petits repas, conviviaux, sur l’herbe !